
LIBIDO EN BERNE : POURQUOI ON A MOINS DE DÉSIR, ET COMMENT S’EN SORTIR
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C’est un fait : parfois, on se sent bloqué.e.
La libido, c’est plus ce que c’était. On a moyennement envie, on aimerait avoir envie, on se dit que ça serait chouette, en théorie, d’avoir un rapport, mais que dans les faits : flemme.
On préfère mater le dernier épisode de sa série, ou juste scroller pendant des heures et oublier le reste.
Qu’est-ce qui m’arrive ?
J’étais pas comme ça, avant. On était pas comme ça, avant.
Le désir, ça va, ça vient
Déjà, je te propose d’essayer de déculpabiliser : le désir, ça fluctue au cours de la vie. Au cours de l’année. Au cours du mois, même.
Pourquoi ? Parce que, comme l’humeur, la météo, et à peu près tout dans la vie, on ne peut pas s’attendre à ce que ça reste constant et homogène.
Le désir dépend de tellement de facteurs, il est normal qu’il ne soit pas le même en fonction des circonstances.
Peut-être que tu es sous l’eau au boulot, ou que tu es en post-partum, ou que c’est un peu plus tendu que d’habitude avec ton/ta partenaire.
Peut-être encore que tu as enchaîné les rhumes, ou que tu es à une période de ton cycle qui te donne envie de tout sauf t’adonner aux plaisirs de la chair, ou que ta relation à ton corps est dans une période compliquée.
Peut-être, enfin, que tu prends moins de plaisir dernièrement (ce qui ne te donne pas envie de recommencer), ou que tu as vécu une agression physique ou psychologique, ou que les conséquences d’un traumatisme remontent depuis peu.
Avec un peu de chance, tu as tout ça en même temps (parce que la vie est vraiment sympa comme ça, parfois).
Bref, un million de raisons, internes et externes, qui expliquent que ta priorité, là tout de suite, ça ne soit pas de sauter au lit avec ton/ta partenaire pour rejouer la Foire du Trône.
Tout le monde passe par là
Les hommes aussi ont des baisses de désir
Bombardé.e.s comme on est de messages sur le sexe, on peut avoir l’impression que tout le monde a tout le temps envie.
On peut avoir l’idée, par exemple, que les hommes cis sont des machines à désir, toujours à ça d’une érection, des genres de bombes instables prêtes à détonner à la moindre brise.
Newsflash : passée l’adolescence, le désir des hommes cis est bien moins automatique et constant (et encore, tous les ados ne sont pas les mêmes).
N’en déplaise aux partisan.e.s du « mais les zoms ont des besoiiiiiiiiins il faut qu’ils fassent du sexe tout le temps sinon ils explosent et leur pénis tombe » (je confonds peut-être avec le gluten de South Park), le désir des hommes est complexe, et il peut, lui aussi, fluctuer.
Tu n’es pas moins un homme (un vrai ! whatever that means) si tu traverses une période où tu préfères mater Netflix que le corps d’autres gens.
Les femmes et la baisse de désir
On est sans doute un peu moins étonné.e.s de constater qu’une femme cis a des périodes avec et des périodes sans.
On attribue souvent ça aux hormones, et clairement, ça peut jouer. Mais c’est loin d’être la seule raison !
Newsflash, encore : les femmes cis sont plus que des sacs d’hormones (incroyable, je sais). L’une des raisons principales de la baisse de désir chez les femmes cis (les études en question n’ont pas interrogé de femmes trans), c’est la charge mentale.
Une autre raison souvent invoquée, c’est le fait que leur partenaire ne prenne pas en compte leur plaisir, à elles.
Encore une fois, les études dont on dispose pour ces données ont pour base uniquement des personnes cis et hétéros. C’est bien dommage, parce que les personnes cis et les personnes hétéros ne sont pas les seules à rencontrer des fluctuations de désir et des situations complexes en termes de désir, de plaisir, et de sexualité en général. Ça mériterait une newsletter dédiée, un podcast dédié, un livre dédié…
Tu n’es pas « anormal.e »
Tout ça pour dire : si tu as une baisse de désir, tu n’es pas cassé.e. Tu n’es pas anormal.e. Tu n’es pas irrémédiablement sortie de l’activité « sexe ». Tu n’as pas besoin de faire une croix sur l’espoir d’avoir à nouveau un orgasme un jour dans ta vie.
Cela étant dit, je tiens à préciser que les personnes asexuel.le.s existent, qu’iels ne sont pas non plus cassé.e.s ni anormal.e.s, et qu’iels font probablement une croix sur l’activité « sexe » avec joie et entrain. Cheers.
Si tu souhaites savoir comment sortir tout doucement de cette période « sans », je te propose d’aller plus loin…
Comment se sortir de cette baisse de libido et retrouver son désir ?
1ère étape : rétablir le sentiment de sécurité
Avant de penser plaisir ou performance, il faut reconstruire la sécurité.
Le désir a besoin de sécurité
Le désir, ça a beau être une fonction physiologique (= « ça marche sans intervention consciente »), ce n’est quand même pas quelque chose qui peut se développer pleinement quand on se sent en danger.
Alors, quand je parle de danger, je ne parle pas de danger littéral.
Dans ce cas, la priorité est de demander l’accompagnement de professionnel.le.s, associations et autres, pour sortir de la situation de danger. Je n’en parlerai pas ici, ce n’est pas le sujet de cette newsletter. Je te renvoie vers le 3919 pour plus d’infos.
Je parle du SENTIMENT de danger qu’on peut ressentir, comme si on était pris en chasse par un tigre, même quand on vit à Paris (ou Marseille, ou Évaux-les-Bains).
Je parle d’anxiété.
Apprivoiser son anxiété
La première chose à faire, pour reconstruire une relation joyeuse à sa sexualité, c’est de se pencher sur l’anxiété sous-jacente qu’on peut avoir. Ça peut être directement liée à la sexualité, ou être lié à d’autres facteurs et empiéter (notamment) sur le désir.
Ça peut être très prononcé, généralisé, constant, ou ça peut être ponctuel et provoqué par des situations bien précises.
Reconnaître les raisons de son anxiété
Par exemple, j’ai eu une patiente qui a vécu une grosse baisse de désir, après quelques mois passés avec sa copine.
Tout allait bien au lit, mais assez vite, elle a commencé à douter des sentiments de sa meuf, de la pérennité de leur relation. Ça s’est immédiatement répercuté sur son désir : pour elle, impossible de s’abandonner, de se lâcher, sans avoir mille pensées qui surgissent, du style « je vais la perdre », « ça ne mène à rien », « je suis la seule à avoir des sentiments », « dès que je tombe amoureuse ça fait fuir les gens », etc.
Après s’être rendue compte de ça, on a travaillé sur ses attentes, sa confiance en elle, son historique de relations émotionnelles, et sa capacité de communication pour évoquer le sujet avec sa copine. Avec des discussions, de la vulnérabilité, et du temps, elles ont pu renouer un lien de confiance et développer leur relation. Le désir est revenu avec.
Se libérer de la pression
Le cerveau, le corps, ont besoin de sécurité ressentie pour ouvrir les vannes du désir et du plaisir.
Ça vaut aussi pour toute l’anxiété liée à la performance. Parfois, créer des espaces d’exploration sans attentes, lâcher prise avec l’idée de but à atteindre, ça peut être la clé pour débloquer le flot du désir.
2ème étape : Reconnecter avec ton corps, sans pression
A propos de laisser tomber les buts et l’idée de performance : pourquoi on se met autant la pression pour « produire » un orgasme ?
Pas de pression pour avoir un orgasme
Alors, ok. Je sais qu’on revient d’une période où l’orgasme des femmes était absolument secondaire. Où la sexualité était toute entière tournée vers le plaisir masculin.
Et je sais que, très souvent, c’est encore le cas. Le militantisme féministe a fait un formidable travail pour revendiquer le droit à l’orgasme des femmes, le militantisme queer se saisit avec entrain de cette idée du droit à l’orgasme comme quelque chose de révolutionnaire, et ça l’est ! C’est absolument génial comme outil, tant que l’orgasme de certaines personnes sera subversif.
Et…
Si on ne se focalise que sur l’orgasme, paradoxalement, on risque de passer à côté du plaisir.
Ou, parfois, on se sent « obligé.e » de simuler.
L’orgasme, ce n’est quand même pas automatique. Il faut parfois un assortiment de conditions pour que ça arrive : détente suffisante, stimulations pile où il faut, comme il faut, aussi longtemps qu’il faut, environnement propice, connexion à son corps…
Alors, faire attention au plaisir de tout le monde (je dis bien tout le monde), ABSOLUMENT.
L’injonction à l’orgasme, c’est un non.
Alors, on fait quoi ?
Et si, justement, on se foutait la paix avec l’idée d’avoir un orgasme, et qu’on essayait le plaisir pour le plaisir ?
Pour commencer, on peut tenter un petit exercice : caresser, avec le plat de sa main ou le bout de ses doigts, toutes les zones de son corps qu’on veut, SAUF les zones traditionnellement sexuelles (tétons, parties génitales, anus).
Le but, ça va être de noter, en toute curiosité et ouverture d’esprit, ce qu’on ressent. Pas de chercher à se procurer du plaisir, mais de constater ce que ça fait.
Ça chatouille ? Ça ne fait rien ? C’est chaud ? C’est froid ? C’est rugueux ? C’est agréable ou désagréable ? Ça peut se faire seul.e ou à deux.
A quoi ça sert ? Principalement, à s’habituer au toucher juste pour le toucher. Et aussi, à renouer une relation avec son propre corps et ses propres sensations, sans attente particulière.
3ème étape : s’entraîner à exprimer ses envies et ses limites
Non, c’est non.
Aucune négociation là-dessus.
Mais encore faut-il savoir le dire. Encore faut-il avoir confiance en soi, en sa voix, pour exprimer ses propres limites.
Apprendre à s’exprimer
Je ne dis pas que la responsabilité du consentement repose sur la personne qui veut dire non. Je dis que, parfois, ce n’est pas si simple que ça d’exprimer ses limites.
Pourquoi ? Habitué.e à vouloir ne déplaire à personne, peur de vexer, manque d’habitude, éduqué.e à ne pas faire entendre sa voix, et encore plein d’autres raisons.
Alors, le mieux, c’est de s’entraîner. Répéter, seul.e puis avec quelqu’un de confiance, des phrases qu’on va pouvoir utiliser quand on en aura besoin. S’entraîner à les dire avec une voix ferme, claire, confiante.
Un petit exercice
Je te propose quelques phrases, mais à vous d’imaginer celles qui vous correspondent, ou d’adapter celles-ci à votre voix personnelle.
« Je préfère qu’on arrête là »
« Stop »
« Non »
« Je n’aime pas ça, arrête, faisons autre chose / faisons ça à la place »
« Ce n’est pas mon truc »
« Je n’ai pas envie »
« Je ne suis pas à l’aise, arrête »
« J’ai changé d’avis, je ne veux plus »
« J’ai envie que de X/Y/Z, tu veux bien ? »
« ça te tente de faire X/Y/Z ? »
4ème étape : réinventer ta sexualité selon TES règles
Et si ta sexualité ne ressemblait plus à un script imposé ?
On a souvent l’impression qu’un rapport sexuel, ça ressemble forcément à ça :
(IMAGE)
Et encore, dans le meilleur des cas. Parfois c’est
(IMAGE)
Alors que bon, pourquoi ça ne ressemblerait pas à ça
Ou ça (IMAGE)
Ou ça (IMAGE)
Ou encore ça (IMAGE)
Bref, la seule limite, c’est l’imagination (et le consentement libre et éclairé de toutes les personnes qui participent, évidemment).
Explore TA sexualité
Quelque chose t’a toujours tenté ? Tu as entendu parler d’une pratique que tu voudrais tenter ?
Ou, si tu es décidément très ok avec les pratiques classiques habituelles de ta vie sexuelle, pourquoi ne pas varier les plaisirs en bousculant un peu l’ordre dans lequel tu fais les choses ? Pourquoi pas du sexe oral après une pénétration ? Pourquoi pas se mettre un petit défi d’avoir autant de plaisir que possible sans pénétration ?
Bref, à toi d’inventer ta propre sexualité en y remettant une petite dimension de jeu et d’exploration.
Si tu veux aller plus loin, ou si tu as envie d’accompagnement pour explorer ton propre désir et ton propre plaisir, stay tuned (ou abonne-toi) pour ne pas rater l’annonce du lancement de mon guide dédié à l’exploration de soi !